• Forum social mondial - Les crises que le monde traverse confortent les altermondialistes qui prônent une « économie à finalité humaine ». La crise financière en cours offre une fenêtre idéale de tir contre le capitalisme. Les têtes pensantes du mouvement altermondialiste ont affûté leurs armes en confrontant leurs idées, à l’occasion du Forum social mondial de Belem (Brésil) qui a pris fin hier (le 1er février NDLR).
    « Le moment est extrêmement favorable pour convaincre le plus grand nombre qu’il est possible d’agir ensemble, de vivre ensemble autrement », soutient Chico Whitaker, le co-fondateur du Forum social mondial.

    Sur la nature de la présente crise, Dominique Plihon, président du Conseil scientifique d’ATTAC (Association pour la taxation des transactions pour l’aide aux citoyens), estime qu’elle est globale et qu’elle conjugue plusieurs crises (écologique, énergétique, alimentaire, sociale et culturelle). La crise écologique, définit-il, est la conséquence de l’exploitation industrielle des ressources naturelles depuis la seconde moitié du XIXè siècle. Quant à la crise énergétique, elle se manifeste par la tension sur les prix due à l’épuisement des ressources non renouvelables. La crise alimentaire, elle, engendre dans 30 pays la malnutrition et les problèmes de croissance chez les enfants. La crise sociale se caractérise par un très fort accroissement des inégalités entre les pays et au sein de chaque pays. La crise culturelle est aussi celle des valeurs et du sens.

    Dominique Plihon explique aussi que les racines de la crise remontent aux années 80. Cette époque fut marquée par l’avènement du capitalisme financier et l’idéologie néolibérale selon laquelle la libéralisation des échanges commerciaux et la libre circulation des capitaux permettraient l’allocation optimale des ressources entre les pays et les individus. Le néolibéralisme prône le recul de l’intervention de l’Etat pour laisser le marché s’autoréguler. Le président du Conseil scientifique d’ATTAC signale également que c’est le « consensus de Washington », en 1990, qui a ouvert la voie à la mondialisation en poussant tous les pays à s’ouvrir aux mouvements des capitaux, aux privatisations, à la dérégulation, à l’élimination de tout obstacle à la concurrence, à la protection des droits de propriété universels des multinationales, à la baisse des prélèvements fiscaux.
    Un maximum de profit.

    Ces mesures ont permis aux détenteurs de capitaux de gagner en puissance et de mettre la pression sur les gouvernements avec les délocalisations. « La puissance du capital est liée à sa mobilité. Il met les pays en concurrence grâce à la possibilité de déplacer ses activités là où il peut faire le maximum de profits », souligne Dominique Plihon qui fait remarquer que « cette politique fait naufrage aujourd’hui ».

    Pour Alfred Fontaine, leader syndical martiniquais, le capitalisme financier ne pouvait que mener à cette impasse parce que « l’argent n’a servi qu’à faire de l’argent au lieu servir au bien-être collectif ». « A la longue, les pauvres n’ont plus de pouvoir d’achat et ne peuvent plus rembourser leurs dettes. La fuite en avant a fini par s’arrêter au mur », explique-t-il en dénonçant le « chantage honteux » des multinationales et des grandes banques. « Quand ça va, ils disent : pas d’Etat. Quand ça ne va pas, ils crient : aidez-nous sinon, des milliers de gens iront au chômage », critique le leader syndical qui s’élève contre cette « socialisation des pertes » en faisant payer par tous les citoyens les pertes occasionnées par quelques personnes.

    Il ne suffit pas de constater l’impasse du système actuel. Les altermondialistes en sont conscients et ont pensé une nouvelle forme d’économie dans laquelle « la finalité des échanges n’est pas l’accumulation des profits, mais la réponse aux besoins de ceux qui échangent ». Dominique Plihon préconise de redonner vie à l’économie solidaire et sociale en redonnant leur place aux coopératives.

    Chico Whitaker soutient de son côté qu’il faut « des échanges tournés vers la satisfaction des besoins humains, vers une économie à finalité humaine. Il faut redéfinir les fondements d’un nouveau système social dans lequel l’économique est soumis au politique ».

    Comment faut-il procéder pour partager ces idées avec le maximum de personnes ? Les altermondialistes y ont pensé. « Il faut favoriser une prise de conscience des conséquences globales de chaque acte de consommation, de chaque comportement, afin de rendre illégitimes les pratiques actuelles », explique Chico Whitaker. L’étape suivante consistera à accompagner les citoyens dans leurs démarches de changement. « Cette éducation passe aujourd’hui par Internet, notamment pour les jeunes, mais aussi par les échanges humains notamment au sein de petits groupes dans la durée ». Vaste programme. Même si le capitalisme a du plomb dans l’aile, il est loin de chuter.

    Librement repris et légèrement adapté du journal L'Essor n°16374 du 2 février 2009, article de B. TOURE - Envoyé spécial
    http://www.afriquejet.com/actualites/economie/un-autre-monde-est-plus-que-jamais-possible-2009020220979.html

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